Période Vercasson
1900 – 1918
Un nouveau concept publicitaire
Avec la mise au point de la lithographie, l’affiche de grandes dimensions voit le jour vers 1850. A l’époque on circulait à pied ou à cheval et du fait de la lenteur des déplacements on avait le temps de regarder ce qui était exposé sur les murs et les palissades. Ceci explique que les affichistes de la fin du 19ème comme Chéret, Mucha, Toulouse-Lautrec ou Steinlen ont dessiné de grandes estampes avec beaucoup de détails. A l’arrivée de l’automobile, les vitesses s’accélèrent. L’affiche doit interpeller l’homme de la rue dans les plus brefs délais. C’est dans ce contexte que les affiches de Cappiello de 1900 à 1918 créent le début d’une nouvelle ère dans l’art publicitaire, ce sera la « période Vercasson ».
En 1900, Cappiello s’associe avec l’imprimeur et agent publicitaire P. VERCASSON & Cie. Très rapidement il définit les bases de ce qu’on appellera « l’affiche moderne ». Il dit : « lorsque je conçois un projet d’affiche, ma première préoccupation est la recherche de la tâche. Cette chose difficile à définir, qui à grande distance, accrochera le regard du passant par l’intensité de sa couleur, le chatouillera par le titillement de ses tons et le retiendra assez de temps par l’agrément de son aspect pour le contraindre à lire l’affiche. » (Annales Politiques et Littéraires, 1er juin 1907). Il invente la théorie de l’arabesque : « structure essentielle de la composition, son épine dorsale en quelque sorte, le parti décoratif qui reliera entre eux les différents éléments pour lui donner « la forme » ». Il dit aussi : « Le sujet objet importe peu. L’affiche n’a pas absolument besoin d’être en harmonie avec le produit annoncé. » (L’Art Vivant du 15/12/1926 – Les Maitres de l’affiche / Cappiello par Louis Chéronnet).
Chocolat Klaus
La première affiche établie suivant cette théorie
est celle pour le Chocolat Klaus. Son impact
auprès du public a été considérable. Rien dans le dessin ne suggérait de chocolat, ce qui stimula la curiosité du public. Au bout de quelques semaines tout Paris connaissait le Chocolat Klaus et beaucoup en avait acheté. Un peu plus tard, à la suite d’autres campagnes d’affichage toute l’Europe découvrait cette marque. Tout le monde réclamait du « chocolat avec la femme au cheval rouge ».
Avec Cappiello, Vercasson a conclu un contrat
d’exclusivité qui durera jusqu’à la Grande Guerre.
Vercasson trouvait les clients industriels et servait
d’intermédiaire, Cappiello s’engageait à produire
chaque mois au moins 5 esquisses et 4 maquettes
de 1m x 1,4m en agrandissement d’oeuvre
existante. En contrepartie Cappiello touchait une
rémunération minimale mensuelle. Leur
collaboration fut un magnifique succès. Les
affiches de Cappiello furent vendues dans toute
l’Europe, en Argentine et aux Etats Unis. Bien
qu’ils se soient séparés en 1918, Vercasson a
continué à imprimer quelques affiches dont
l’esquisse ou la maquette avait été vendue antérieurement.
La Belle époque
Les affiches de Cappiello de 1900 à 1919 appartiennent à ce qu’on appelle la période Vercasson, ce qui correspond à la Belle Epoque augmentée des quatre années de guerre. Ce sont de grands dessins aux lignes simples avec des fonds unis, influencé par les estampes japonaises. Cappiello associe souvent une femme au produit à commercialiser. C’est une jolie parisienne, blonde ou rousse, élégante, distinguée, un peu espiègle et aguichante mise en avant par rapport au produit qui reste secondaire. On est dans le même esprit que dans les affiches de Chéret mais avec un dessin beaucoup plus dépouillé. Ce seront l’ « Absinthe Ducros », « Livorno Stagione Balneare » « La Rose Jacqueminot »… L’œil est attiré par la femme et très peu par le produit.
La mode vestimentaire est celle de la Belle Epoque. La femme se doit de porter un corset pour avoir la taille la plus fine possible et pour cambrer le buste en avant et le bassin en arrière. L’essentiel de sa tenue est composé d’une robe longue avec un grand nœud volant au vent, un large décolleté, des bijoux ou un collier discret et un chapeau ouvragé. Elle n’est jamais statique, toujours aérienne ou en mouvement ce qui rend l’affiche très vivante.
Mais Cappiello n’utilise pas que des femmes merveilleuses dans ses affiches, il utilise aussi des personnages fantastiques, des animaux exotiques ou imaginaires, des dieux ou des diables, le tout avec une pointe d’humour.